samedi 31 janvier 2009

"Pouvez-vous tourner les pages de votre Malone, très cher..." demanda l'amie de son ami Paul dirigeant vers son livre un micro relié à un magnétophone. "Parfait" dit-elle "Maintenant laissez choir quelques glaçons dans votre martini..." lui demanda-t-elle, car son ami Paul s'adonnait à la fadeur du martini at home, c'est son droit... chute qu'elle enregistra sous l'oeil de plus en plus étonné de son ami Paul dont la gorgée de martini fut enregistrée également." Excellent" triompha l'amie de son ami Paul " une sonate apéritive et littéraire ... mes amies vont enfin entendre le silence, l'utopie, les contre-chants..."s'écria-t-elle levant vers le plafond sa bande magnétique et ajoutant " j'adore ce John Câge! " "Queidje ! " soupira son ami Paul se replongeant dans son Malone.

mercredi 28 janvier 2009

Incapable du moindre changement, de la moindre variation, il traverse la rue utilisant le mécanisme bien rodé de son corps docile. Il s'arrange, s'expatrie, met à contribution toutes ses facultés, vibrionne. Comme s'il glissait sur un tapis de mousse, exprimait par des gestes répétés sa troublante exaltation. Puise les meilleurs effets de ses immensités. Méprise l'essentiel et parcourt l'arrangement avec l'arrogance du victorieux. Des chants, des hommes, des refrains à lasser la meilleure des oreilles. Tout un corps insécable empli à demi de lourds dépôts imprévisibles.

lundi 26 janvier 2009

"Quelle triste fin pour ce si talentueux Peter Greenbaum, enregistrant de piteuses soupes pour un label obscur, entouré de quelques irlandais ventripotents qui confondent blues et camomille..." lui disait son ami Paul, les yeux fixant la surface hyaline du sauvignon récemment servi. " De plus l'ex vif argent ne sait plus que faire de sa gibson, on dirait Gandhi manipulant une kalachnikov, les doigts de l'un se prenant dans la gachette, ceux de l'autre s'entravant dans les cordes..." " Etrange retour à la scène d'une idole déchue.." lui répondit-il " Pire, c'est la femme à barbe dans sa cabane à la foire du trône..." objecta son ami Paul en buvant gaillardement son sauvignon à la posthume santé d'un sacré guitariste.     

dimanche 25 janvier 2009

Son ami Paul, était plongé dans les mots croisés du supplément dominical "spécial vins de France"d'un quotidien assez répugnant quand il surpris la conversation animée de deux de ses voisins légèrement touchés par un abus volontaire de picon-bière."Et ton vinyle d'Otis Rush avec le magiquissime all your love que standardisa ce bon vieux rouquin de John?" disait l'un."Vendu sur e-bay." répondit l'autre,"parti, volatilisé, je ne l'ai même pas copié..."répondit l'autre."Quoi! tu as vendu le Otis Rush..." Son ami Paul séchait lamentablement sur le neuf lettres verticalement d'un cépage blanc dont la première lettre était un s et l'ultime un n. Les deux allumés au picon continuaient de plus belle:"et ton Sony and Terry featuring John?" "Parti, envolé...""Sony Boy with the Yardbirds?" "pfuit, envolé..." "Tu n'as pas gardé le Sony Boy with the Yardbirds..."Repoussant avec rage la feuille de chou et brisant son crayon, son ami Paul commanda tout de go "un porto s'il vous plaît!" A quoi le serveur un peu surpris répondit"Un porto pour l'hétéronyme." Son ami Paul hésita alors entre un fado et ce fameux all your love. Non, décidément c'est Imagine qu'il sifflota.       

vendredi 23 janvier 2009

Son ami Paul contemplait la reproduction d'une lithographie de Bram, grise et bleue, toute en angles bruts et en énigmatiques labyrinthes, grise comme son humeur, bleue comme ceux de son âme. Se réconfortant d'une gorgée de son sauvignon coutumier, il tenta in petto quelques interprétations du dit dessin, il y voyait des pays lointains où rien n'est pesant, pays de nuages gris et bleus qui font un monde sans misère, un monde où le silence élargit l'espace. Il suivait Bram et se perdait avec lui devant la toile immaculée, se taisait et attendait... Sur la table l'image grise et bleue gardait son mystère et son ami Paul semblait prendre de l'altitude, se rapprocher du sublime..."C'est un pigeon, votre truc, et pas très bien dessiné..." dit le garçon par dessus son plateau où tanguaient deus sauvignons, jaunes comme les blés, qu'il déposa sur la table éclaboussant le pigeon.         

mercredi 21 janvier 2009

"Pourriez-vous me confier votre semelle? j'aimerais en faire un frottage..." demanda l'amie de son ami Paul, qui lâchant un instant Malone, leva négligemment la jambe et lui tendit la semelle. "C'est de l'essuie-tout que vous utilisez chère amie?" questionna son ami Paul."Pas du tout" répondit son amie frottant de plus belle "c'est un papier tibétain confectionné spécialement pour notre atelier d'expression artistique, que nous payons assez cher d'ailleurs mais qu'importe, les bénéfices vont à la fondation Serge Dali..." "Salvador..." précisa son ami Paul. "Non,Lama, je vous remercie, vous pouvez baisser la jambe." Ce que fit son ami Paul. "Et maintenant? "demanda-t-il."Je vais maroufler cette empreinte, puis acrylique, remarques marginales et prédelles, la routine, cher ami, oh j'adore cet Alechinski..." " sky!" soupira son ami Paul qui reprit son Malone un peu brusquement.    

samedi 17 janvier 2009

"On aura tout vu"se lamentait son ami Paul,"cette Ono, croque-notes de profession se permit de prescrire à John Cage, qu'une douleur au pied handicapait, une cure macrobiotique comme le plus vulgaire des médicastres." Sauvignon, alors puis il continua: "Cage se mit aux pousses de soja, les mâchonnant sans grande conviction. Il enregistra le son de cette mastication et en  fit une partition à jamais perdue car elle servit à emballer un reste de sushis qu'il destinait à son ami Burroughs, lequel préférant la rosette s'empressa de faire disparaître sushis et partition dans le vide-ordure. Jamais on entendit cette Sweet Ono Suite qu'il avait composée en l'honneur de la rusée nippone... Quand au pied de Cage..."Le regard perdu sur les pentes du mont Fuji, son ami Paul commanda une autre tournée de sauvignon macrobiotique. 

mardi 13 janvier 2009

Son ami Paul:" Ce Lacan se joue de nous, il se la joue, je le jalouse, ce genou où tout se noue.."
Le réputé docteur Pimply:"mmmmh..."
SaP:"C'est mon chien qui me l'a aboyé dans un rêve que nous avons fait.."
LrdP:"mmmmh..."
SaP:"Laisse ou nombril, qu'importe ce fil qui nous tient se coupe d'un coup quand la coupe est pleine, ah l'âme de l'opinel dont la lame sans état tranche ce que l'enfance a filé..."
LrdP:"mmmmh..."
SaP:"C'est Lazare qui distribue le jeu de maux, jouer alors son va-tout sans atout, sa vie à la carte..."
LrdP:"mmmmh..."
SaP:"L'humour de papillote, peut-être...?"
LrdP:"mmmmh..."
SaP:"Mon premier est donné, on lève mon deuxième et mon troisième est vénéré, mon tout n'a pas d'arêtes et ..."   
LrdP:"mmmmh..."
SaP:"mmmmh..."

dimanche 11 janvier 2009

"Je me demande" lui disait son ami Paul " si ce journal intime que je m'efforce à tenir contre vents et marées ne se réduit pas en un triste catalogue de mes pires pensées, une vidange, un égoût..."Le frais muscadet n'y pouvait rien, l'humeur de son ami Paul avait hissé le drapeau rouge."Je suis débordé par le quotidien, mes volets ont le gris changeant des ciels bretons, je perrose, je ciorane, je me beckettise..." Le garçon dont le visage avait ce teint abricot fraîchement ramené d'un séjour 3jours-4nuits aux îles Canaries ordonna soudain :"un muscadet et une bouée pour monsieur Paul"  

mercredi 7 janvier 2009

Un carnet de Monsieur Songe à la main son ami Paul y péchait quelques pensées rétives, quelques mots de viatique durs à articuler. Mortin n'était pas loin, poil à gratter d'une pensée biscornue qui perd ses sens et ne conserve (quelle horreur ) que l'odorat. Un moraliste en fin de compte, un moraliste avec des lunettes noires.

samedi 3 janvier 2009

"Mais que faites-vous avec ces boites de biscuits rouillées?" demandait son ami Paul à son amie, qui empilait des boites aux contenus improbables, chiffons, coupures de journaux, vieilles photos, ficelles et fils de fer. " Je sacralise." répondit-elle, ajoutant quelques cailloux ramassés dans l'allée d'un cimetière. " Un sacré foutoir ! " murmura son ami Paul, qui reprit son Malone là où il l'avait laissé, tandis que son amie froissant une poignée de tickets de métro lui dit: " J'adore ce Boltansky ! " "Boltanski " soupira son ami Paul.

jeudi 1 janvier 2009

L'engagement politique de Michaux se résumait au soutien d'un syndicat de gazelles. Soutien sans faille connaissant l'apartisme de l'ex-belge. Soutien sans avenir quand on connaît la voracité du jaguar. Exclure ces prédateurs du syndicat fut une mesure prise dans l'urgence par quelques gazelles radicales que la majorité brouteuse ne comprit pas vraiment. Les jaguars profitèrent du malaise pour en croquer quelques unes y ajoutant antilopes et bubales, histoire de semer le trouble dans cette savane en crise. Et Michaux dans tout ça ? Il se demandait de quelle façon le puma surmontait sa tacheture.